lundi 27 juin 2016

Le facteur humain dans l'usine du futur (6)

Résumé des épisodes précédents. Depuis janvier 2016, j'ai chroniqué la vie d'une communauté d'industriels réfléchissant sur le facteur humain dans l'usine du futur.

27 juin 2016. Pour sa sixième réunion, le groupe de travail initié par la CCI Alsace sur "Le facteur humain dans l'usine du futur" s’était donné rendez-vous à Imbsheim chez l’un de ses membres, Etienne Wathle, Directeur d’Alpaci, un site de 12000 m² qui produit des tubes et embouts de filtres à cigarettes.

"Les travaux d’agrandissement se sont accompagnés d’une supervision globale des effectifs et de chaque ligne de production, explique Etienne Wathle. Chaque opérateur gère sa ligne de production, de ses approvisionnements jusqu’à la palettisation de ses produits dans le magasin central. Le système d’information reprend les données essentielles et ne trace que les données à valeur ajoutée."

"Acheter des lignes de production n’est pas innocent et dévoile une partie de notre secret de fabrication, précise le Directeur du site. Du coup, nous achetons nos machines brique par brique et ligne par ligne. Ceci nous évite de donner des informations à nos concurrents. Et cela nous permet d’intégrer notre propre ingénierie et tous les processus de fabrication, impression des marques et des packagings incluse."

Les travaux ont été préparés avec la Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé au Travail Alsace-Moselle (CARSAT) pour la gestion prévisionnelle des risques de TMS (troubles musculosquelettiques). "D’ici 2020, 30% de nos 140 salariés vont partir à la retraite, forts de 30 ans d’expérience en moyenne. Un vaste chantier de renouvellement de ces postes de travail, tout en développant les profils plus techniques et plus pointus du fait des dépannages machines de plus en plus complexes."

Après la visite d'Alpaci, retour en salle pour les membres du groupe de travail. Après un débriefing de la visite d’Alpaci, place au point-étape de chaque atelier de travail.

Atelier Séminaire de sensibilisation et Serious Game


En complément des travaux présentés lors de la session précédente de travail, le groupe convient de ne pas réinventer la poudre et d’optimiser les outils déjà éprouvés par le Groupe de travail. Pour la prochaine étape, les trois participants de cet atelier accompagneront Wolfberger qui rencontrera trois entreprises alsaciennes déjà engagées dans l’usine du futur : SEW, Mondelez, Hager. Un autre rendez-vous chez Divalto est également à l’étude.

Atelier Entreprise libérée


Quels métiers et quels niveaux de décision sont impliqués selon les problématiques ? Pour y répondre, les participants à cet atelier sont en train d’identifier leurs attentes respectives afin de préciser les terrains d’expérience que chacun va pouvoir expérimenter dans son entreprise.

Le tableau a évolué depuis la fois précédente.


Liebherr, Wolfberger, Aldès et Schlumberger ont ainsi d’ores et déjà identifié des chantiers concrets qui pourraient servir de champs d’expérimentation. L’ensemble des participants s’accorde pour souligner que la transformation de l’entreprise doit impliquer l’ensemble des Directions.

C’est le cas chez Liebherr avec un projet de transformation de l’atelier Débit. "On transforme une partie du process avec ses impacts pour les opérateurs, explique Stephan Kohler, chef de projet Liebherr de cet investissement. Ce qu’on souhaite, c’est que les opérateurs soient plus responsables, plus autonomes et plus agiles dans l’utilisation de ces nouvelles machines pour qu’ils soient davantage en responsabilité et plus flexible dans la gestion de leur ligne de production."

Pour Franck Keiffer, Responsable des ressources humaines de Liebherr, "si on passe sous silence les aspects d’évolutions des compétences, de transfert des compétences, on manquera une occasion pour les RH d’anticiper ces mutations à venir. L’agilité touche également les partenaires en interne de cet atelier (RH, méthodes, Bureau d’études, maintenance etc…). Par exemple, pour la formation, étudier celles proposées par les fabricants peut nous permettre de les intégrer dans notre process d’apprentissage." Une approche que partage également Mathieu Rollet, Directeur Industriel de NSC Schlumberger, qui souligne que "ces transformations sont autant d’opportunités pour favoriser la transversalité des démarches."


Atelier Communication


Animatrice de cet atelier, Anne Bertrand, Gérante de Méca Service, est au diapason des autres ateliers. "Il faut communiquer sur les différents niveaux de la hiérarchie et s’assurer que le message est bien descendu et perçu." Autre participant de cet atelier, Georges Cierzniak, Directeur technique et commercial de Spirotec, insiste : "En tant que dirigeant d’entreprise, notre rôle est de favoriser la communication et de donner du sens. Notre rôle est ensuite de privilégier la communication transversale pour favoriser l’amélioration continue. La hiérarchie doit favoriser les lieux physiques et virtuels de communication. Il faut trouver les bons canaux, adaptés à chaque situation." Un point de vue partagé par Etienne Wathle : "La Direction doit retourner sur le terrain également pour rencontrer ses salariés. C’est à elle de donner du sens, pas uniquement à la hiérarchie de proximité. Et c’est souvent à la machine à café et au niveau du coin fumeur que les informations circulent." Anne Bertrand tempère toutefois cette approche. "Ce n’est pas à chaque instant à la Direction de porter ces messages, mais aussi aux responsables d’équipes qui doivent être des animateurs et des relayeurs de sens."

Les indicateurs sont également abordés par l’atelier Communication. "Le bien-être futur des collaborateurs de l’entreprise est dépendant des indicateurs de performance et de résultats, d’où l’importance de bien les choisir et de les faire connaître de façon positive, au service du sens", explique Etienne Wathle. Lors de cette restitution, les autres membres du groupe de travail évoquent néanmoins la difficulté de communiquer sur des résultats positifs, souvent synonymes d’un relâchement induit sur le terrain.

La communication doit également être accompagnée d’une vraie réflexion et de vraies actions pour améliorer le bien-être au travail. Il faut impliquer les personnels à la co-conception de ces projets.

Un autre aspect concerne le facteur temps. "C’est un élément qui est important et qui diffère selon les cibles", précise l’un des participants. On le voit, les ateliers en mouvement confrontent les idées des industriels, des échanges nécessaires pour faire ressortir les bonnes pratiques que le groupe de travail entend diffuser avec le monde socio-économique alsacien en mars 2017.

Mars 2017 : L’usine de futur en Alsace


Mars 2017… Depuis la première séance du groupe de travail, les participants se sont donnés comme objectif de présenter et partager leurs travaux en mars 2017. Du coup, cette sixième séance de travail a été l’occasion de constituer un nouvel atelier pour préparer cet événement. Un atelier animé par Bernard Bloch, chargé de missions à la délégation territoriale Alsace d’EDF Grand Est. "Réussir Mars 2017 commence dès aujourd’hui. Parmi plusieurs scénarii, le groupe s’est mis d’accord pour organiser un événement sur plusieurs jours. Au même titre que chacun de nous a dû passer par un apprentissage pour s’approprier les enjeux et les problématiques soulevés par la transformation des entreprises vers l’usine du futur, il va nous falloir proposer au public de vivre cette expérience d’apprentissage. Et nous avons tous convenu que cela ne pourra pas se faire en une conférence de deux heures. Nous imaginons notamment de proposer des visites d’entreprises déjà engagées dans la démarche Usine du futur. De même, le travail sur les communautés de pratique sera également au programme de ces journées. Les dirigeants d’entreprises ne sont en effet pas la seule cible potentielle. Nous avons décidé de ne pas avoir d’a-priori et de laisser venir tous ceux que le sujet intéressera. Des RH, des responsables Qualité, des étudiants, les jeunes, les médias, … Ce nouvel atelier va vraiment commencer cet été."

"La préparation de cet événement de mars 2017 nous incite à nous poser de nouvelles questions dès aujourd’hui pour les expérimenter d’ici-là afin de proposer des premières pistes de réflexion, explique Jean-Philippe Bootz, responsable de la Chaire Management des connaissances à EM Business School. Par exemple, comment proposer des modules de formation pour permettre également aux étudiants des écoles d’ingénieur et de commerce d’entrer dans cette démarche Usine du futur ?"

Ce nouvel atelier ne manque pas d‘idées et l’été sera sans nul doute fructueux pour ses participants. D'ailleurs, le 13 septembre, le groupe de travail participera à une réunion d’échanges et de réflexion avec le groupe d’Idée Alsace qui travaille justement sur l’usine du futur, notamment sur l’entreprise libérée et l'économie circulaire.


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