mercredi 8 avril 2020

La crise d'adolescence professionnelle

Quand je discute avec mes étudiants en Master 2, j’essaye de leur faire comprendre notamment que dans six mois ils seront sur le marché de l’emploi et qu’il est temps qu’ils s’assument.

Les devoirs d'étudiants sont un vrai révélateur


Le moment de discuter des devoirs des étudiants est un vrai révélateur et m'offre une belle opportunité d'essayer de leur faire passer mon message. 

Je leur explique que la question pour eux n'est plus de faire un devoir pour obéir au prof et avoir au moins la moyenne. Si c’est un devoir, c’est qu’ils ont aussi un droit : le droit de se « faire mal » pour montrer non pas leurs connaissances mais leur compréhension des connaissances acquises et leur valeur ajoutée à la thématique abordée. 

Ce n’est pas un concours et il ne s’agit donc pas d’être meilleur que leur voisin. Il s’agit pour eux d’être meilleurs qu’eux-mêmes la veille !

L’une des clés pour apporter de la valeur ajoutée consiste selon moi à bien circonscrire une thématique pour éviter de tomber dans un dossier générique qui ne sera qu’une synthèse de documents vus de ci de là. En circonscrivant une thématique, il est plus simple d’aborder une problématique précise pour la traiter sous plusieurs angles et être force de proposition et de valeur ajoutée.

Avec mes Master 2 de Commerce électronique, quand un étudiant ou une étudiante me demande si je veux bien être son correcteur pour un dossier technique, je lui pose deux questions.

Quelle technique veut-il aborder ? J’essaye en effet de m’assurer de leur pertinence et de leur actualité dans la transformation numérique en cours. Les sujets qui m’ont été soumis cette année tournaient par exemple autour du référencement orienté expérience utilisateur, de la réglementation pour la protection des données personnelles, des drones, d’une plateforme e-commerce de revente, les influenceurs, … 

Quel est le domaine d’activité ciblé ? Cela peut être, la mobilité, le luxe, le textile, les loisirs, les voyages, le sport, l’énergie, la santé, … Je les incite aussi à restreindre le périmètre géographique étudié. Une étude portant sur le Monde sera plus générique qu’une étude portant sur le Grand Est par exemple, forçant l’étudiant.e à trouver des chiffres d’autant plus pertinents.
 

Oser rêver


Parfois, ils ne savent pas vraiment le marché qu’ils veulent étudier. Je leur demande alors de me dire dans quel domaine ou quelle entreprise ils rêveraient de bosser. Et quand ils m’ont répondu, je leur dis que c’est peut-être le moment de commencer à renforcer leurs arguments de recherche d’emploi avec ce dossier technique qui peut leur permettre d’apporter de la valeur ajoutée à leur futurs recruteurs potentiels. 



Oser se planter avant de réussir


Il y a quelques années, j’avais demandé à mes étudiants de m’expliquer le dernier article qu’ils avaient publié sur le blog de leur Master. L’un d’entre eux m’avait expliqué qu’il avait écrit un article synthétisant son dossier technique portant sur le référencement géolocalisé sur Facebook. 

Après l’avoir remercié d’avoir « osé » en parlait devant ses camarades qui ne s’étaient pas bousculer pour me répondre, je lui avais expliqué le fond de ma pensée. Je résume : même si la techno évoquée n’était pas très innovante, le problème de son sujet était plutôt qu’il était trop vaste. Si j’avais été lui, j’aurais par exemple abordé le sujet en circonscrivant la problématique au cas de la chaussette dans le Grand Est. 

Cela l’aurait forcé à étudier le marché de la chaussette et des fabricants, notamment Labonal implanté à Dambach-la-Ville, de voir comment, par qui et où ils distribuent leurs produits, d’étudier également le mix communication de ce marché précis du textile, pour alors proposer des pistes d’optimisation du référencement géolocalisé sur les moteurs de recherche et les réseaux sociaux. 

Oser s'assumer


Je leur ai également expliqué que s’il avait fait cela, il aurait pu promouvoir son article ensuite auprès du groupement des agences de communication et de webmarketing, auprès de groupements du textile nationaux et locaux, auprès du Maire de Dambach-la-Ville, ainsi qu’auprès du DG, du DRH et du DirCom de Labonal. Et il aurait même pu ajouter sur son CV une vraie ligne décrivant son étude, cliquable vers son article. 

Oser être soi-même


Cette problématique que j’appelle également la crise d’adolescence professionnelle (quand est-ce qu’un étudiant apprenant va devenir un adulte sachant à l’aise dans ses baskets ?) a été à l’origine d’un talk que j’avais développé pour le TEDx de La Rochelle en 2016 : Le Permis d’être soi-même

En résumé, j’expliquais que le Permis d’être soi-même s’obtient à condition d’avoir passé quatre étapes dans l’ordre : le permis de rêver ; le permis de se planter ; le permis de réussir ; le permis de s’assumer.

Ce matin d'avril 2020, profitant du confinement pour corriger des dossiers étudiants, j'ai pu me rendre compte que ce Permis restait vraiment d'actualité et que je n'ai pas fini de partager ce message.